Quand on ne désignait pas encore Paris comme la capitale des plaisirs, c'était pour la peindre en cité du vice ; en d'autres termes, le sexe et la ville ont de tous temps eu partie liée, le premier se coulant dans la seconde pour dessiner sa propre carte... qui ne fut pas toujours celle du tendre.
C'est de préférence au centre que la chair prend ses quartiers, en dépit des efforts renouvelés pour en reléguer le commerce et les pratiques en périphérie. Les bordels du Moyen Âge s'épanouissent entre le palais royal de la Cité et Notre-Dame, le plus fameux lupanar du XVIIIe siècle est établi à proximité des Halles tandis que lorettes, lionnes et cocottes de la Belle Époque prospèrent dans les lieux à la mode. Autour de ces points d'ancrage, étuves, boudoirs, galeries, petites maisons, salons, théâtres et jardins s'offrent aux empressés comme à ceux qui aiment faire durer le plaisir, vénal ou non.
L'histoire est rythmée par les phases répressives et les périodes plus conciliantes en même temps qu'elle s'avère diversement sensible à la température des mœurs. Telle chronique galante nourrira la légende d'un souverain tandis que les dépravations d'une aristocratie en fin de course contribueront à mettre le feu aux poudres. Les soupirs s'échappant des alcôves font parfois monter les grondements de la rue.
La ville du pouvoir et des révolutions, la ville du nombre et des lettres, la ville de la mode et des salons excite les désirs ; les innombrables cours que ceux-ci empruntent orientent à leur tour le déroulement de la comédie urbaine. Comme si les petites vertus façonnaient la grande histoire, comme si, au fil des siècles, ribaudes, catins, mignons, libertins, grandes horizontales, érotomanes, chasseurs et séductrices s'étaient relayés pour en décrire les soubresauts.