Christian Malon photographie les foires millénaires de Normandie depuis plus d'un demi-siècle. Il s'est senti attiré vers ces lieux éternels et éphémères où les hommes ont des pognes de forgeron et des trognes d'atmosphère. Le photographe a appris à s'approcher d'eux, à apprivoiser ces ambiances, à ruser avec ces ciels changeants, ces lumières qui virent brunes, ces nuages qui se teintent de nuances vernissées et ces fumées laiteuses s'élevant des rôtisseries à gigots, des chanfreins des demi-sang ou de la croupe osseuse des laitières ruminantes.
Car le reporter d'automne et de plein vent est un lève-tôt, un traqueur d'aube, artiste de la lumière rasante, mousquetaire du contre-jour qui stylise les silhouettes et allonge les ombres des haies vives comme un trait au fusain sur une toile blanche. Pour Christian Malon, la photographie est une conversation, doublée de grandes manoeuvres pour capter les yeux malicieux dont l'éclat se cache sous l'océan des casquettes de Tergal... (François Simon.)