Il y a une quarantaine d'années, Daniel Guérin préfaçait ainsi un premier recueil de textes sur le communisme libertaire:
"C'est à toi, jeunesse d'aujourd'hui, que je dédie ces essais. Je sais que tu te détournes des idéologies et des mots en "isme", que la carence de tes aînés a fini par rendre creux. Je sais que tu nourris une méfiance tenace à l'égard de tout ce qui touche à la "politique"... Je sais que le "socialisme", si souvent trahi par ceux qui s'en réclament, suscite ton juste scepticisme.
Mais ce qui te détourne du socialisme, nous dis-tu, ce n'est pas la perspective de mettre fin à l'oppression de l'homme par l'homme, ce sont "les bureaucrates et les purges".
Dans la majorité, tu as un sentiment très vif de l'injustice sociale et, dans tes rangs, nombreux sont ceux qui ont conscience que "le capitalisme est condamné".
Le communisme libertaire, face à cette vieillerie banqueroutière qu'est le socialisme jacobin autoritaire et totalitaire, est marqué du signe de la jeunesse. Non pas seulement parce qu'il est le secret de l'avenir, le seul substitut possible, à la fois rationnel et humain, à un régime économique historiquement condamné, mais aussi parce qu'il correspond aux aspirations profondes, bien qu'encore confuses, de la jeunesse d'aujourd'hui, sans la participation et l'accord de laquelle il serait vain de prétendre reconstruire le monde."
Aujourd'hui aussi, nombreux sont ceux qui ressentent l'urgence d'arracher notre monde à la rapacité des possédants et à la dictature de leurs bandes armées. S'il n'y a ni programme miracle, ni guide infaillible pour y parvenir, ces textes de Daniel Guérin nous apportent cependant des leçons tirées de deux siècles de luttes pour l'émancipation sociale, des leçons qui éclairent les combats à mener pour bâtir un monde nouveau.