Oreste, mort sans être mort, debout dans
une folie qui n'en finit pas, parle depuis
des siècles. Il traverse depuis des siècles
un champ de sépultures. Il parle au présent
depuis un corps qui ne lui appartient
pas, depuis une bouche qui s'exprime
dans une langue qu'il ignore, dans une
époque dont il ne sait rien. Il parle au
présent sans être sûr d'avoir parlé autre-fois,
avant sa mort, du temps de son éventuel
vivant. Sans être sûr que ce présent
devienne un jour un passé. Sans être tout
à fait sûr d'avoir habité un corps, une
bouche, un jour, autrement qu'en parole.