Ce livre raconte soixante années de la vie de femmes et
d'hommes dont la profession fut d'apporter chaque semaine à
jour fixe la bonne image dans les villages les plus isolés de
leur département de moyenne et haute montagne.
Pour eux, loin des feux de la rampe, le cinéma a, plus que
strass et paillettes, été synonyme de routes sinueuses, dangereuses sous les intempéries, de projecteurs jouant, quel que
soit le temps, à l'extérieur des salles de cafés ou de restaurants
pour des raisons de sécurité, de conflits avec le tout jeune
Centre National de la Cinématographie, de problèmes avec
l'installation de l'électricité, de coup de grâce avec l'avènement de la télévision... Bref ! d'incessantes batailles pour
continuer à exercer leur beau métier de tourneur.
Pourtant, malgré leur vie difficile - qui pourrait faire l'objet
d'un scénario de film - chaque soirée était une soirée de fête :
leurs soucis, leur fatigue disparaissaient au fur et à mesure
que grandissait le bonheur du public ; riant aux larmes
devant les facéties de Beaucitron ou de Diavolo, rêvant sous
les regards de Tino, se retrouvant dans l'accent de Fernandel
ou celui de Raimu.
Au travers de la préservation des témoignages de certains
d'entre eux, nous avons voulu rendre hommage à la mémoire
de tous ces obscurs des salles auxquels le cinéma doit aussi
un peu de sa magie.