Comme elles sont à l'opposé de ce que notre siècle a voulu pour ses filles, on les a appelées «les oies blanches». Les jugeant du haut d'une culture qui se persuade d'avoir triomphé du passé en déliant les esprits et en délaçant les corps, on s'est moqué de leurs corsets, de leurs poupées, de leurs bonnes œuvres et de leur orthographe. Objets de nos apitoiements ou de nos révoltes, elles ont servi de repoussoir à nos modèles de vie, à nos principes éducatifs, à nos désirs de bonheur, à nos volontés de liberté, alors qu'elles subsistent en chacun de nous dans un rêve de perfection. Nous n'en finissons pas de les ressusciter sous des formes inattendues, des cérémonies démodées et ravissantes et jusqu'à l'avant-garde de nos ambitions féministes.
Princesses et grandes aristocrates, elles n'étaient pas toutes les femmes mais elles en furent le miroir, le modèle ou le mythe. Part la plus aimable et la plus aimée de l'humanité, elles furent élues pour être le reposoir des vertus de la féminité comme le garant des grandes valeurs féminines. A toutes les époques, elles bénéficièrent de soins et d'attentions infinis, elles reçurent les éducations les plus raffinées, elles acquirent les connaissances et les talents les plus distingués. Leur destin occupa les esprits les plus éminents de leurs siècles. Elles furent les Demoiselles, et pour elles on refit le monde.