" Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre. "
Il faisait particulièrement doux ce soir-là.
Nous étions en été, un samedi soir, la fête annuelle de la base nautique des Crozes avait battu son plein toute la journée.
Justine avait demandé à ses parents, également présents, de pouvoir passer la nuit avec sa cousine et deux copains de classe sur l'îlot des Bois-Obscurs, au centre du lac. Un camping entre pré-adultes. Une récompense pour le bon travail fourni toute l'année. Promis, ils seraient de retour le lendemain, à 10 heures au plus tard.
Le dimanche matin, les adolescents se font attendre. L'un des parents, de rage, parcourt la distance à la nage. Il découvre alors l'étendue du massacre : les corps meurtris, outragés, dénudés.
Les familles des victimes, des accusés, la région, tous vont connaître le chaos et le déclin.
Ma vie d'enfant a basculé ce jour-là. Quelqu'un – quelque chose –, au visage indéfini, malveillant, a pris possession de mon imaginaire, de mon âme.
Vingt ans après le drame, l'occasion de dépasser ce traumatisme collectif s'offre à moi.
Je vais enfin pouvoir donner un visage à mes peurs.