Si Deleuze a contribué à mieux nous faire entendre la puissance
affirmative du désir et la portée métaphysique des hallucinations
et des délires, il n'a fait, dans une certaine mesure, que
prolonger le sens de la fêlure dans le roman naturaliste et son
idéologie du fatum social ou héréditaire.
Il s'agit surtout d'une logique de la folie qui excède la question
du langage et des choses ; non seulement par le recours à
la colère nomade ou à la production de l'image configurant le
désir fini mais illimité comme la surface d'une sphère, mais
par une authentique tentative d'apprécier la portée proprement
métaphysique des hallucinations et des formes du délire, sans
jamais vouloir quitter le plan d'immanence.
Le présent essai s'efforce de prolonger une intuition restée
en friche : la prise au sérieux de la dimension «théologique» des
délires dont la catégorie psychiatrique obsolète des «délires
mystiques» est une occultation au lieu d'être l'explication, le
dépliement qu'elle aurait pu suggérer.