Une politique de l'enfance
Comment, en France, l'animation des loisirs enfantins s'est fait une place à côté du service social et de l'éducation spécialisée ? Inspirée du principe selon lequel c'est dans le passé (des patronages) que l'on trouve les éléments dont est formé le présent (des centres de loisirs sans hébergement), la socialisation par les loisirs est envisagée à travers une institution polymorphe représentée par les trois termes successifs de « patronages », « centres aérés » puis « centres de loisirs ». En présentant les organisations concernées, il s'agit de fixer les repères chronologiques essentiels pour comprendre la genèse du métier d'animateur. Avec des préoccupations liées à l'hygiène et à la surveillance, le patronage incarne l'institution qui, du XIXe siècle aux années 1970, propose des activités récréatives aux enfants tout en participant de la construction sociale de l'École, de la religion et de la politique. Si la métaphore guerrière fixe les bornes des discours « laïques » et « catholiques », un consensus pédagogique définit la nature primordiale de l'enfant par le jeu.
Le développement du travail des femmes et de leur scolarisation, la tertiarisation du salariat, la légitimation du terme unificateur de « travail social », le déclin des colonies de vacances, la quasi-disparition des patronages paroissiaux constituent la toile de fond de la naissance officielle, en 1970, du centre de loisirs. Depuis lors, le passage du vocable de « patronage » à celui de « centre de loisirs » signe une laïcisation de l'institution qui se manifeste par la normalisation juridique, la centralisation bureaucratique, la scolarisation des pratiques, l'autonomisation et la spécialisation des fonctions corrélatives de l'accroissement de la division du travail d'encadrement. La structure du champ de l'animation reste cependant extrêmement dispersée, entre un niveau central (État, associations nationales et départementales) et un niveau local (communes, associations) lui-même très diversifié.