Au miroir de la montagne relate les deux séjours que W. S. Merwin fit au
Mont Athos au début des années 1970. Nous sommes en septembre ; le flot des
visiteurs s'est tari. L'auteur arpente les chemins de monastère en monastère, se perd,
arrive à la nuit, parle cuisine ou théologie avec un simple moine ou un supérieur
de couvent. Il s'y montre fasciné par une nature intacte, s'inquiète du devenir
des lieux, décrit avec la même justesse des fresques anciennes, un verre d'ouzo
qui attend le visiteur, l'ascèse de tel abbé ou la fraîcheur des sources...
Ce qu'on admire dans ces pages portées par une écriture aussi savante que
libre, c'est la conjonction de l'acuité du regard et de la liberté du propos. Il y a chez
Merwin une attention minutieuse portée aux moindres mouvements du langage, mais
aussi le refus de soumettre le réel à la littérature. L'étrange République monastique
qu'il a sous les yeux ne lui inspire aucun souci hagiographique ni aucune ironie, mais
une méditation magnifiquement rythmée, qui semble transcrire à la fois l'allégresse
et la fatigue du marcheur, la profondeur de la réflexion et la netteté picturale du
regard - nous donnant ainsi à goûter la saveur d'un lieu unique au monde.