Comment peut-on survivre à l'épreuve du déracinement ? Sanda Nitesco, arrivée de Roumanie il y a 30 ans a trouvé la réponse en préservant la mémoire des nourritures de son enfance, accompagnées naturellement de tout un monde de sensualité, d'émotions, de poésie.
Les personnages familiers qui jouaient chacun un rôle dans les rituels liés à l'élaboration et la dégustation de cette cuisine avec ses odeurs, ses saveurs, que nulle autre ne peut remplacer, surgissent à travers des lettres à une amie française. L'auteur fait revivre l'atmosphère patriarcale d'une famille roumaine des années 50, sous les traits des membres de sa propre famille dont elle dresse de véritables portraits, vus à travers l'œil et la sensualité du peintre.
Autrefois, à Bucarest, il y avait Esti, la «servante au grand cœur», dodue et espiègle, il y avait la mère, médecin, qui se chargeait de la cuisine plus fine d'influence française, il y avait aussi le père qui aimait les gâteaux ratés, et puis les «tantis», passées maîtresses dans l'art des confitures, le rituel du café turc, les excursions dans les Carpathes et les vacances à Dobriceni, le village olténien où Esti rencontrait son homologue de la campagne, Florica. De tout cela, il en reste le puissant reflet et une nostalgie vibrante et tonique dont l'auteur s'inspire pour reconstruire ce monde dans sa terre d'adoption, tous les jours. Au fil de ces lettres fictives, un va-et-vient s'installe entre les deux cultures, dans un dynamisme qui rompt toute monotonie. Loin de tout passéisme mièvre, ce livre mêle passé et présent sur la même longueur d'onde, celle du bonheur d'exister.